Hillion Georges (1909 – 1977)
Adjudant, 4ème Escadron, 3ème Peloton. Chef de char Hotchkiss 88 / 40768. Equipier : André Phez

Les informations contenues dans cette page ont été aimablement transmises par Edyth-Charlotte Hillion ou proviennent d’un mémoire rédigé par Marie-Paola Bertrand-Hillion.

Georges Hillion

Biographie

Georges Hillion naît le 21 mai 1909 a Hennebont. Il est orphelin très jeune, son père Francis ayant été tué à la bataille de Marhange le 20 août 1914. Georges se marie le 25 juillet 1939 à Hennebont avec Monique Gazelle. Le 1er septembre suivant, il est affecté au 6ème Cuirassier à Reims puis en novembre 1939 au 2ème Cuirassier a Saumur.

Le 12 mai 1940, Georges Hillion participe avec son régiment à la bataille de Thisnes en Belgique. II est porté disparu le 13 mai 1940. Finalement rescapé de son peloton de chars, mais avec 26 blessures, il est fait prisonnier de guerre puis rapatrié a Hennebont comme grand blessé en février 1941. Ces faits lui valent alors l’attribution exceptionnelle de la médaille militaire et de la croix de guerre avec citation à l’ordre de l’armée.

Dès son rétablissement, il entre dans la Résistance et forme une compagnie de 200 hommes dans le Morbihan : la première compagnie du 7ème bataillon FFI. II reprend le combat sur le front de Lorient. En 1945, il est cité à l’ordre de la division et reçoit la médaille de la Résistance. En 1950, il est fait chevalier de la Légion d’honneur. Après avoir participé à la campagne d’lndochine et à celle d’Algérie, durant lesquelles il recevra encore de nombreuses distinctions, il terminera sa carrière en 1962 en qualité de lieutenant-colonel.

[Auteur :Franck Hillion]


Récit du combat mené par Georges Hillion à Thisnes

II est environ 20hl0 quand j’ai la joie de voir deux chars ennemis déboucher de l’angle mort, progressant lentement sur ma position. Ils ne semblent pas m’avoir vu, je prends mon temps, ne voulant pas rater un si bel objectif. Je tire et constate que j’ai touché au but. Le char s’arrête. J’aperçois une vive lueur, et une fumée assez épaisse sort du véhicule, je ne m’en soucie plus. Je pointe le deuxième char, le premier coup semble ricocher sur la tourelle. Je tire alors une deuxième fois en pointant légèrement plus bas; le coup porte sous la tourelle à la partie avant; le char reste sur place. Jusqu’à présent, rien ne m’a touché, si ce n’est peut-être quelques balles de mitrailleuses. Je fais déplacer mon char pour attaquer les 5 chars suivants. Pendant ce mouvement, mon char est frappé, et moi-même grièvement blessé. Je décide de sortir et de tenter de continuer la lutte à terre. Le brigadier Phez m’aide à déclaveter la mitrailleuse, il doit sortir avec des chargeurs et se poster derrière l’arbre où nous étions précédemment tandis que je sortirai par la tourelle avec la mitrailleuse. L’atmosphère du char est devenue étouffante. Je sens mes forces diminuer, mon oeil est alors complètement fermé. Je sors péniblement par la tourelle tenant ma mitrailleuse. Dans ce mouvement, mon casque m’est littéralement arraché de la tête et je tombe lourdement sur le sol. Je rassemble le peu de forces qu’il me reste et réussis à gagner l’arbre…. Je perds connaissance… Mais combien de temps mon évanouissement a-t-il duré ? A un certain moment, je ressens une douleur épouvantable aux jambes, je regarde et aperçois un char allemand qui me passe sur les deux jambes (la chenille s’arrête à la hauteur de la rotule). Le chef est à la tourelle et regarde en direction de l’endroit occupé par le premier peloton. Je m’efforce de ne pas crier sous la douleur, craignant un dernier coup. Le char continue alors sa route se collant à la haie du champ. Après son passage, des obus tombent dans le terrain labouré qui s’étend devant moi. Des gerbes de terre sont soulevées a quelques mètres de moi; je suis partiellement recouvert, et deux petits éclats d’obus viennent me frapper a la main gauche. Le brigadier Phez est mortellement blessé. Je suis à bout et je retombe dans le néant. Quand je reviens à moi il fait nuit noire, J’appelle PHEZ à plusieurs reprise et, n’obtenant pas de réponse, je décide de rechercher sa trace dans les environs immédiats, mon état ne me permettant pas de couvrir grand espace: ma jambe gauche ne réagit plus et me parait broyée, la droite bien que douloureuse, semble fonctionner Je réussis à me mettre sur le ventre. Hélas mes recherches pour retrouver PHEZ sont vaines. Je me traine tant bien que mal sur le petit chemin qui conduit au village et parcours ainsi cinquante mètres environ. Deux Allemands armés de mitraillettes, surgissant de derrière une haie, arrivent jusqu’a moi et me posent ces deux questions.

« Etes-vous Français ou Anglais ? » Je réponds.

« Où sont les autres ? » Je ne dis mot.

Ils m’examinent, parlent en allemand et veulent me porter. Je leur demande de me trainer en raison de l’état de mes jambes…Ce qu’ils acceptent de faire jusqu’à une maison des environs. II est environ minuit. C’est la famille Rappe qui me prend chez elle. Cette famille a trouvé une ambulance allemande qui me conduit dans un premier temps au monastère de Hannut, tenu par les Pères Croisiers. Pleins de blessés arrivaient et un Père nous donna l’extrême onction. Là, ils m’ont mis un grand écriteau autour du coup « grand blessé, à opérer d’urgence ». Entassés à plusieurs dans une camionnette, hurlant de douleurs puisque notre véhicule roulait sur le bas-côté du fossé, car l’armée avançait sur la route, nous avons été transportés à l’hôpital de Liège. Je fus opéré plusieurs fois par des médecins anglais, tout en étant dans un coma qui a duré 17jours. J’avais 26 blessures.

Après plusieurs semaines à Liège, ce fut l’hôpital de Bedburg dans le Luxembourg belge. Je fus ensuite envoyé peu de temps dans un camp en Allemagne, et rapatrié par la croix Rouge, en zone libre (Limoges, puis Locoyarne) comme grand blessé de guerre, fin janvier 1941, avec deux béquilles. J’ai mis 2 ans pour me remettre complètement, et j’ai commencé mon activité avec les FFI. »


Georges Hillion

Convalescence

En février 1941, Georges est rapatrié par la Croix-Rouge. Il est arrivé marchant avec des béquilles, pesant 38 kg, complètement affaibli. L’émotion fut grande.

Lentement, Georges se remit de ses blessures.


Témoignage d’Edyth-Charlotte

“En 1989, je suis allée à Thisnes avec une photo que la famille Rappe avait glissée dans la poche de mon père en 1940… mais on ne connaissait pas le nom de cette famille… J’ai fait du porte à porte en racontant l’histoire de mon père et en montrant la photo. Après une bonne heure une personne qui était instituteur a appelé sa belle-mère Simone qui a reconnu la famille Rappe : le père, la mère et Willy qui devait avoir 6 ans sur cette photo et un chien colley. Puis j’ai fait la connaissance d’un vieux monsieur qui était jeune journaliste à l’époque et qui m’a conduit à l’endroit où se trouvait le char de mon père à l’orée du village… Ce fut un moment plein d’émotions”.


Croix de guerre avec palme
Georges Hillion